Margaret Atwood : La servante écarlate


Margaret Atwood la servante ecarlateLa servante écarlate

Margaret Atwood

Editeur : Robert Laffont (2 juillet 2015) (546 pages)

Genre : Science-Fiction / Dystopie / Anticipation féminine / Extrémisme religieux

Nous sommes aux Etats-Unis. Enfin, c’est ce que Margaret Atwood nous fait comprendre aux travers des mots de son héroïne, la servante nommée Defred.

Difficile pour le lecteur d’y croire. Ce qui est décrit dans La servante écarlate est un monde où le puritanisme fait loi, où l’extrémisme religieux règne en maître.

Au fil des pages, on découvre un monde dévasté par la pollution et par la baisse plus qu’inquiétante du taux de natalité. A partir de là, une certaine catégorie de jeunes femmes sont enlevées pour être rééduquées par les Tantes dans le but servir de reproductrice chez les hauts dignitaires.

Defred, la narratrice du roman est une Servante écarlate. On ne connaitra jamais son ancien prénom. D’ailleurs, inutile de retenir celui-ci, car il changera lors de sa prochaine affectation. Cette perte d’identité est le reflet de sa nouvelle vie où elle n’est plus « qu’un utérus à deux pattes« , dédiée au service du Commandant et de sa femme pour leur offrir un bébé qui fera le bonheur des Maîtresses de maison.

Ce qui est marquant, c’est la notion de castes visibles aux codes couleurs vestimentaires. On y retrouve les Maîtresses de maison, habillées de bleu qui tricotent toute la journée pour les hommes au front. Le pays est en guerre, mais je n’ai pas compris contre qui…ou je ne m’en souviens plus. Les Marthas en vert, sont cuisinières, femmes à tout faire. Et enfin, les servantes écarlates, comme Defred, habillées de rouge avec des ailes blanches autour du visage (que je me représente comme des ornières). Elles ne se déplacent en ville jamais seules et sont accompagnées par leur semblable. La trahison est la hantise de toutes ces femmes qui feraient tout par jalousie.

Celle-ci est un peu plus potelée que moi. Elle a les yeux bruns. Elle s’appelle Deglen, et c’est à peu près tout ce que je sais d’elle. Elle marche d’une allure modeste, la tête baissée, les mains gantées de rouge croisées devant elle, à petits pas brefs comme un cochon dressé sur ses pattes de derrière. Au cours de ces promenades, elle n’a jamais rien dit qui ne soit strictement orthodoxe, et d’ailleurs moi non plus. Il se peut qu’elle soit une véritable croyante, une Servante pas seulement par le nom. Je ne peux pas courir de risques.

« La guerre se passe bien, paraît-il », dit-elle.

Je réponds : « Loué soit-Il. »

« On nous a envoyé du beau temps. »

« Que je reçois avec joie. »

« De nouveaux rebelles ont été vaincus, depuis hier. »

« Loué soit-Il. » Je ne lui demande pas comment elle le sait. « Qui étaient-ils ? »

« Des Baptistes. Ils avaient une place forte dans les Collines Bleues. On les a enfumés. »

« Loué soit-Il. »

Parfois je voudrais seulement qu’elle se taise et me laisse marcher en paix. Mais j’ai soif de nouvelles, quelles qu’elles soient ; même si ce sont de fausses nouvelles, elles doivent signifier quelque chose.

Les États-Unis sont devenus une sorte d’attraction pour les touristes, ce n’est pas sans un serrement au cœur que les Servantes écarlates voient s’approcher un car de Japonais l’appareil photo en bandoulière. La tenue des femmes pourrait paraître choquante (jupe courte, talons hauts, rouge à lèvres ….) mais rappelle le temps d’avant…quand tout était encore normal…

Je m’habillais de la même façon. C’était la liberté.Occidentalisées, disait-on.

Les touristes japonais se dirigent vers nous, en gazouillant, et nous détournons la tête trop tard : nos visages ont été vus.

Ils ont un interprète, costume bleu standard et cravate à motifs rouges, avec l’épingle représentant l’œil ailé. C’est lui qui se détache, sort du groupe, devant nous, nous bloque le passage. Les touristes se massent derrière lui ; l’un brandit un appareil de photo.

« Excusez-moi, nous dit-il à toutes les deux, assez poliment. Ils demandent s’ils peuvent prendre votre photo. »

Une fois toutes les trois semaines, quand la servante est sûrement en pleine période d’ovulation, la cloche de la maisonnée sonne. Tous les habitants cessent leur activité pour se rendre dans le boudoir de Madame. Elle vient aussi participer à la cérémonie et attend dans sa magnifique robe bleue que le Commandant arrive. La servante rouge est au sol, en appui sur ses genoux.
Quand le commandant entre dans la pièce, il lit un passage de la bible et tous prient en silence pour le succès de l’opération. Puis tout le monde est congédié. La cérémonie continue alors à huis clos en présence de la Maîtresse de maison, qui tient les mains de la servante écarlate sur le lit. Torture morale et physique, la servante écarlate ne peut que prier pour que de ce viol, son ventre offre à ses maîtres un enfant. Elle n’aura droit qu’à être testée dans 3 familles. Au bout de 3 échecs, c’est le rejet pour elle et l’expatriation dans les colonies où l’on est sûr de ne pas survivre longtemps puisque le travail est forcément lié à la manipulation de produits toxiques.

L’écriture de Margaret Atwood est d’une efficacité redoutable. Trois époques s’entremêlent sans qu’il soit difficile pour le lecteur de s’y retrouver. Chacune offrant à son lecteur de nouveaux éléments de l’histoire. Tout est parfaitement maîtrisé pour ne point trop en dire dès le début.

C’est un livre glaçant, bouleversant qui ne pourra vous laisser de marbre. Un vrai coup de coeur pour moi.

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La servante écarlate a été lu dans le cadre du challenge dystopie et Défi SFFF & Diversité chez Lhisbei (item 15).

 

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10 réponses à “Margaret Atwood : La servante écarlate”

    • Non, on ne peut oublier cette jeune femme. Elle me poursuit et je ne puis d’ailleurs m’empêcher de faire le rapprochement avec les jeunes filles qui pensent partir faire le jihad, et qui une fois sur place, serviront, elles aussi des utérus à deux pattes.

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